Côte d’Ivoire : DU PIMENT ET UN FOUET POUR DÉLIVRER UN ENFANT DIT SORCIER
« Mon prophète nous a enseigné qu’il y a des esprits qui ne peuvent être chassés que par la violence », tels sont les propos justifiant le châtiment infligé à un enfant accusé de sorcellerie dans la commune d’Abobo. Dame Yao, témoin des faits, raconte :
« Je m’appelle Madame Yao. Il y a quelques mois, j’ai profité d’un moment de libre pour rendre visite à une amie du quartier. À quelques mètres de sa maison, j’ai entendu les cris d’un enfant. Il criait si fort que même les passants s’interrogeaient sur les raisons de ses pleurs. Lorsqu’on m’a ouvert le portail, j’ai eu le cœur brisé. Un petit garçon d’environ 7 à 8 ans, nu et allongé sur le sol, baignait dans du piment et recevait des coups de fouet de la part de mon amie que je venais visiter. Je me suis précipitée pour arrêter ce traitement inhumain et demander les raisons d’un tel acte. « Cet enfant n’est pas bon, sa sorcellerie va finir dans ma maison », a-t-elle rugi pour justifier son comportement. « Qu’a-t-il fait ? », ai-je demandé. « En fait, c’est le fils de mon mari. Depuis un certain temps, le malheur s’abat sur ma maison : les décès de ma mère, du frère de mon mari ; et, tiens-toi bien, tout se perd dans la maison, et mon mari vient de perdre son travail. »
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Je lui ai demandé en quoi l’enfant était concerné dans cette affaire, et elle a répondu : « Je me suis rendue chez notre homme de Dieu, le prophète X. Après plusieurs questions, il a expliqué qu’il s’agissait d’un esprit maléfique qui vivait dans la maison avec nous et qu’il fallait que j’observe bien cet enfant. Ma sœur, je te dis que j’ai rapidement compris qu’il était à l’origine de nos malheurs. Pire encore, suite aux interrogations du prophète, l’enfant a avoué qu’il était responsable de la mort de ma mère. » J’ai répliqué que ce n’était pas possible et que l’enfant avait probablement dit ces paroles sous la pression et la menace. « Non ma sœur, l’esprit qui est en lui est têtu, si on n’utilise pas la force, il ne parlera pas. Donc depuis ce matin, je le fais avouer le reste de ses crimes. Mon prophète nous a enseigné qu’il y a des esprits qui ne peuvent être chassés que par la violence. »
Ne voulant pas contrarier mon amie, je lui ai simplement dit qu’elle devait faire attention, car l’enfant pourrait perdre la vie, et son prophète ne se reconnaîtrait pas dans ces agissements. De plus, son mari pourrait la répudier un jour. Je l’ai laissée, mais j’appelle de temps en temps pour avoir des nouvelles.
Recueilli par Saint Apollos.